Les deux parlementaires de l’opposition avaient été arrêtés lors d’une manifestation interdite par les autorités. Une nouvelle mobilisation est prévue mercredi 29 juin.
Le tribunal de grande instance de Dakar a condamné mardi 27 juin Déthié Fall à une peine de six mois de prison avec sursis pour avoir bravé une interdiction de manifester et relaxé Mame Diarra Fame dans le même dossier. Les deux parlementaires étaient jugés avec 82 autres prévenus, qui ont tous été relaxés.
Ils avaient été arrêtés le 17 juin, lors d’une manifestation à l’appel de l’opposition. Celle-ci avait été interdite par les autorités en raison notamment de « risques de troubles ».
Dakar et la Casamance avaient été ce jour-là le théâtre de heurts ayant fait trois morts, selon l’opposition qui avait chiffré à 200 le nombre de personnes interpellées à travers le pays et exigé leur libération. Le député Déthié Fall « a constamment reconnu avoir été l’organisateur principal » de la manifestation du 17 juin. « Il convient de le condamner à six mois assortis de sursis et à 100 000 FCFA (152 euros) d’amende », a déclaré le président du tribunal, Ahmed Bâ.
Soutiens
Concernant la député Mame Diarra Fame, le juge a estimé que « les faits qui lui sont reprochés ne sont pas suffisamment établis ». « Elle est renvoyée des fins de la poursuite », a-t-il énoncé. Le parquet avait requis un an de prison dont six mois ferme pour Déthié Fall et six mois ferme pour Mame Diarra Fame. Le tribunal a prononcé la relaxe pour leurs 82 co-accusés en raison « de faits insuffisamment établis ».
À leur arrivée au tribunal lundi matin, les députés Fall et Fame avaient été acclamés par le public venu en nombre pour les soutenir. Le principal opposant, Ousmane Sonko, était également présent au milieu de plusieurs cadres de son mouvement. « Je rejette tous ces faits dont on m’accuse, a clamé Déthié Fall. Je n’ai pas participé à la manifestation parce qu’elle n’a pas existé. Nous sommes au Sénégal. Le droit de manifester est inscrit dans la Constitution », a renchéri le parlementaire.
« J’allais voir Barthélémy Dias [maire de Dakar et figure de l’opposition] avec mes deux enfants et je me suis retrouvée dans un fourgon de la gendarmerie. Maintenant il faut me dire si au Sénégal, les lois interdisent d’aller voir des amis, des parents ou des connaissances », a plaidé de son côté Mame Diarra Fame. Les deux députés ont affirmé avoir été « enlevés », sans « aucun respect » pour leur fonction.
Ahmed Aïdara condamné
Par ailleurs, le maire d’opposition Ahmed Aïdara, qui dirige la commune de Guédiawaye (banlieue de Dakar), a été condamné lundi à un mois de prison avec sursis, pour avoir également bravé l’interdiction de la manifestation du 17 juin, par le tribunal de Pikine, une commune voisine.
Les tensions vont grandissant au Sénégal depuis que le Conseil constitutionnel a confirmé l’invalidation, le 3 juin, de la liste nationale des titulaires de la coalition Yewwi Askan wi pour les législatives du 31 juillet. L’opposant Ousmane Sonko, troisième de la présidentielle de 2019 et candidat déclaré à celle de 2024, ainsi que d’autres figures de l’opposition se retrouvent de fait écartés de la course.
L’opposition réclame le rétablissement de la liste et a menacé d’empêcher la tenue des élections. Elle a appelé à une nouvelle manifestation mercredi. De nombreuses organisations de la société civile ont appelé ces derniers jours l’opposition et les autorités au dialogue et à la retenue pour éviter une escalade. (Jeune Afrique)