Des militaires en treillis annonçant prendre le pouvoir, soutenus ensuite par l’armée, des partenaires occidentaux qui condamnent, une médiation des pays voisins : le coup d’État au Niger, encore plein de zones d’ombre, est le troisième du genre au Sahel.

Le chef d’état-major, le général Abdou Sidikou Issa a annoncé jeudi que « le commandement militaire des Forces armées nigériennes (FAN) » avait « décidé de souscrire à la déclaration » des putschistes afin d’« éviter une confrontation meurtrière entre les différentes forces ».

Mercredi soir, des militaires putschistes pour la plupart inconnus avaient annoncé sur la télévision nationale avoir renversé le président démocratiquement élu Mohamed Bazoum, au pouvoir depuis 2021.

Dans cette allocution, le colonel-major Amadou Abdramane a annoncé la suspension des institutions et la fermeture des frontières du pays, justifiant le coup d’État par _ »la dégradation continue de la situation sécuritaire » a_u Niger.

La junte, qui dit rassembler tous les corps de l’armée, de la gendarmerie et de la police, a instauré un couvre-feu de 22h à 5h.

Cette annonce est intervenue à l’issue d’une journée de tension et de confusion, marquée par ce que le gouvernement avait appelé « un mouvement d’humeur » de la garde présidentielle, qui retient le président Bazoum à la présidence.

En fin d’après-midi mercredi, des manifestants massés devant le palais pour rejeter le coup d’État avaient été dispersés par des tirs de sommation de la garde. La situation semblait calme à Niamey et les rues, soumises à de fortes pluies, désertes.

Quelques heures après la vidéo des putschistes, le président Mohamed Bazoum, qui avait pu s’entretenir dans la nuit avec le secrétaire d’État américain Antony Blinken, a publié un message sur Twitter, rebaptisé X, pour affirmer que les acquis démocratiques seraient « sauvegardés ».

Séquestré à la présidence avec sa famille, le président nigérien est « en bonne santé » selon son ministre des Affaires étrangères Hamoudi Massoudou, et « son intégrité physique n’a pas été menacée ».

Sur France 24, M. Massoudou, qui se trouve lui-même à Niamey et assure l’intérim du chef du gouvernement – en déplacement à Rome au moment du coup -, a martelé que les autorités légales et légitimes du Niger restaient aux mains du président Bazoum. Il a appelé les officiers factieux « à rentrer dans le rang » et assuré que tout pouvait se régler par « le dialogue ».

Une médiation ouest-africaine, lancée mercredi avec l’arrivée du président béninois Patrice Talon au Niger, doit tenter de trouver une solution.

Le coup d’État au Niger est un coup dur pour les Occidentaux, et particulièrement la France, qui perdrait l’un de ses derniers alliés au Sahel, immense région minée par les attaques de groupes djihadistes liés aux organisations État islamique et Al-Qaïda, et ravagée par la pauvreté et l’instabilité.

Après le Mali et le Burkina Faso, le Niger, pays de 26,2 millions d’habitants, exportateur d’uranium mais très pauvre, devient le troisième pays du Sahel à connaître un coup d’État depuis 2020. Paris a encore 1 500 militaires au Niger, après avoir mis fin à l’opération antiterroriste Barkhane et avoir quitté le Mali, sous pression de la junte de Bamako.

« Un coup d’État réussi au Niger serait un terrible coup pour la région. Objectivement, Bazoum mettait beaucoup de choses en œuvre pour sauver son pays, et était le partenaire sécuritaire idéal pour les Occidentaux », écrivait mercredi sur LinkedIn l’analyste américain Michael Shurkin de l’Atlantic Council.

Alors que Vladimir Poutine reçoit des dirigeants africains mercredi pour un Sommet Russie-Afrique où il entend évoquer « un nouvel ordre mondial », la crainte est également grande que la Russie, présente notamment au Mali via les mercenaires du groupe paramilitaire Wagner, n’avance ses pions. « Puisse le Niger ne pas faire appel à la Russie, sur qui nous pouvons compter pour aggraver tous les problèmes du Niger », écrivait M. Shurkin.

Ce que l’on sait du coup d’Etat au Niger (msn.com)