« Sont libérés de leur allégeance à l’égard de la France les Français dont les noms suivent : [?] WADE (Karim, Meïssa), né le 01/09/1968 à Paris 15e (75015) », peut-on lire dans le journal officiel français publié le mercredi 17 janvier, et signé par le Premier ministre, Gabriel Attal, et le ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin. C’est donc désormais officiel, Karim Wade, le fils de l’ex-président Abdoulaye Wade (2000-2012), a renoncé à sa nationalité française, qui empêchait sa candidature à la présidentielle sénégalaise du 25 février, au profit de sa nationalité sénégalaise.
Que dit la Constitution sénégalaise ?
Cela faisait plusieurs jours que la polémique autour de la « double nationalité » de Karim Wade, candidat du Parti démocratique sénégalais (PDS) à l’élection présidentielle, enflait. Et pour cause, la loi électorale sénégalaise interdit que les candidats possèdent une double nationalité. Le texte stipule que tout candidat à la présidence « doit être exclusivement de nationalité sénégalaise, jouir de ses droits civils et politiques, être âgé de 35 ans au moins et de 75 ans au plus le jour du scrutin ». Il doit également savoir écrire, lire et parler couramment français, la langue officielle du pays.
Si Karim Wade a estimé dans un message sur son compte X (ex-Twitter) que la querelle sur sa double nationalité « se termine enfin », rien n’est moins sûr à quelques jours de la validation finale des candidatures pour la présidentielle du 25 février, dont il est l’un des principaux concurrents.
Tout s’est emballé dans cette affaire lundi, lorsque le député et candidat du parti d’opposition République des valeurs, Thierno Alassane Sall, a annoncé avoir déposé un recours contre la candidature de Karim Wade, la jugeant anticonstitutionnelle. En effet, le Conseil constitutionnel examine cette semaine les recours déposés par des candidats pré-validés contre d’autres.
De nombreux recours déposés
Né en France d’un père sénégalais et d’une mère française, la candidature de Karim Wade désormais âgé de 55 ans cristallise les attentions. Il avait été empêché par une condamnation en 2015 à six ans de prison ferme pour enrichissement illicite de concourir à la présidentielle de 2019, remportée par Macky Sall. Détenu pendant plus de trois ans, il a été gracié en 2016 par le président Macky Sall, et vit depuis en exil. Cependant, l’Assemblée nationale a finalement voté en août dernier une loi rendant son éligibilité à Karim Wade ainsi qu’à une autre figure de l’opposition, Khalifa Sall, l’ancien maire de Dakar.
La confirmation de sa renonciation simple à sa nationalité française est loin d’avoir apaisé le débat et Thierno Alassane Sall de répliquer ce jeudi sur les réseaux sociaux : « L’immixtion flagrante de la France dans notre processus électoral pour tenter de sauver la candidature de M. Karim Meissa Wade traduit une solidarité entre les tenants de la Françafrique et du néocolonialisme. Comme par magie, Karim Wade exhibe un décret daté du 16 janvier 2024, par lequel le gouvernement français le « libère de son allégeance à l’égard de la France » », a t-il vivement réagi sur X. Pour le député d’opposition, le décret publié ne change rien au recours, car Karim Wade aurait menti en déposant son dossier de candidature le 23 décembre. En effet, parmi les pièces demandées, il y avait une déclaration sur l’honneur dans laquelle il affirmait n’avoir que la nationalité sénégalaise.
Au-delà du cas de Karim Wade, d’autres candidatures ont été pointées par des candidats pré-validés par le Conseil constitutionnel. Il s’agit des deux candidats proches de l’opposant Ousmane Sonko : Bassirou Diomaye Faye et Cheikh Tidiane Dieye. Cette fois, c’est le candidat de la mouvance présidentielle, Amadou Ba, qui a lancé l’offensive, pointant en particulier l’appartenance de ces deux candidats à une entité politique dissoute, en l’occurrence le Pastef.